lundi 9 décembre 2013

L'Institut Pasteur, naissance d'un modèle économique pour la recherche scientifique

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Annick Perrot, Maxime Schwartz, Pasteur et ses lieutenants. Roux, Yersin et les autres, Paris, Odile Jacob, 2013, 270 p.

Formé et bâti au XIXème siècle pour abriter et développer les travaux de Pasteur et de son équipe (Duclaux, Roux, Calmette...), l'Institut Pasteur invente alors un type d'organisation scientifique que le Web a retrouvé et étendu, plus tard, dans d'autres pays, pour d'autres domaines de recherche.
Besoin de liberté, de flexibilité, d'agilité, la raison d'être première de l'Institut fut d'échapper à la lourdeur de sa tutelle administrative, à la bureaucratie de la recherche et de l'enseignement : déjà, le "mammouth" prenait du poids.

Carrefour de la recherche dans plusieurs domaines, l'Institut accueille dès le début des chercheurs étrangers (dont Ilyia Metchnikoff, le premier, futur prix Nobel, spécialiste de l'immunité) et traite des malades venant du monde entier. Lieu de recherche théorique avec ses labos, ses publications (Annales), il est aussi un lieu d'enseignement de haut niveau. Bien vite, l'Institut ouvre des "filiales" indépendantes en province (Lille), à l'étranger, dans les colonies (Tunis, Saigon), en Perse, en Grèce. Logique d'incubation, d'accélération. Le Réseau compte aujourd'hui 32 instituts.
Son modèle économique s'est mis progressivement en place selon un principe clair : les soins (la vaccination) sont gratuits, les produits (vaccins) sont vendus. D'abord philanthrope et idéaliste, l'Institut a fini par organiser une souscription (crowd funding), déposer des brevets. Une entreprise de bio-technologie était née.

De la rage vaincue au BCG, du ver à soie à la diphtéryie, les auteurs nous font partager comme un roman l'histoire des vaccins, les débuts de la microbiologie, de l'immunologie. Livre d'histoire des sciences, l'ouvrage met l'accent sur la biographie des personnages essentiels mais traite le sujet de manière trop journalistique. Après avoir refermé le livre, on se prend à regretter que soient seulement effleurées des questions comme l'organisation du travail scientifique collectif ("l'union des travailleurs de la preuve", comme disait Gaston Bachelard) avec ses rivalités, ses erreurs rectifiées ou encore l'invention du modèle économique d'une institution de recherche généreuse et rigoureuse que le numérique n'a pas encore réussi à imiter.
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